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@ -10,7 +10,7 @@ Nombreuses sont les personnes qui osent tout de même la traversée, par voie te
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Au paroxysme de cette politique migratoire violente et violatrice des droits les plus fondamentaux se trouve le recours quasi systématique aux refoulements, ou « pushbacks ». Pour répondre à nos questions sur cette pratique, nous avons contacté Marion, avocate au Legal Centre Lesvos (LCL) en Grèce.
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**Ravages:** Depuis quand les pushbacks existent-ils en Grèce ?
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@ -34,7 +34,7 @@ Les personnes refoulées de la sorte vers la Turquie se retrouvent sans papiers,
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**M :** On a déjà entendu la commissaire à l’Union européenne Yvla Johansson dire que la Grèce doit être « le bouclier de l’Union ». Elle réagit toujours après les publications d’articles accablants sur le sujet des pushbacks en Grèce, mais au final rien ne bouge et rien ne change. Donc pour le Legal Centre Lesvos, c’est évident que l’Union européenne valide ces pratiques, autant par le manque de positionnement clair que par le financement direct attribué aux opérations aux frontières. Chaque année, des millions d’euros sont alloués pour les interventions aux frontières en bateaux, drones, radars, caméras infrarouge, caméras thermiques et autres technologies toujours plus sophistiquées… Et tout cela sans compter l’argent dédié à l’agence Frontex5 ! C’est donc difficile de croire que l’UE n’est pas complice... L’argument de l’Etat souverain gardien de ses frontières a alors souvent bon dos pour dire que c’est aux Grecs de ré-agir, mais l’Union Européenne demeure en grade partie le trésorier de ces pratiques. Ces politiques sont donc indirectement payées par nous toustes...
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**R:** Quelle est la stratégie du Legal Centre Lesvos, en sachant que votre terrain d’action est celui du plaidoyer et du combat juridique ?
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@ -42,4 +42,4 @@ Les personnes refoulées de la sorte vers la Turquie se retrouvent sans papiers,
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Nous espérons une « décision position » de la CEDH, mais ne sommes tout de même pas certains que cela mènera à une amélioration de la situation aux frontières. Dans d’autres affaires, nous avons déjà vu la Cour justifier les pratiques de refoulement en invoquant le fait que les personnes en migration doivent utiliser les « points d’entrée officiels » pour demander l’asile. Cet argument est toutefois inopérant : le deal signé entre l’UE et la Turquie est justement fait pour que les Turcs retiennent les personnes exilées sur leur territoire et les empêchent de venir en Europe. Ces points d’entrée, c’est pour les touristes et les achats de cigarettes moins chères, aucune chance d’y demander l’asile. La plupart des plaignant.es que nous représentons ont depuis réussi à migrer dans d’autres pays de l’UE et ont été reconnu.es réfugié.es là-bas. Il est primordial de continuer de dénoncer ces méthodes illégales aux frontières malgré la pression accrue sur les ONGs et le monde militant. La Turquie et la Grèce instrumentalisent au maximum le sujet chacune de leur côté. En Turquie, certaines institutions publient et dénoncent le traitement grec des personnes en migration. Elles tentent de calculer le nombre de pushbacks et déplorent publiquement que la Grèce financée par l’UE gère si mal ses frontières. La Grèce quant à elle, dans son discours affirme qu’il s’agit de la propagande d’Erdogan. La vieille rengaine entre les deux pays… et pendant ce temps rien ne change! Il faudra certainement encore des années d’investigations et de dénonciation pour arriver à faire bouger la pratique, si une autre, encore plus dramatique, n’est pas inventée d’ici là. La prochaine piste à explorer est de tenter de faire qualifier les pushbacks en tant que crimes contre l’humanité, et de se battre sur le terrain pénal.
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<p>L’Union européenne, obsédée par la théorie paranoïaque de l’appel d’air, mène une politique d’externalisation de ses frontières depuis maintenant presque dix ans. Pour tenter de paralyser les passages migratoires, l’Union a signé des accords avec les pays voisins, comme avec la Turquie, en 2016, qui est alors devenue un véritable sous-traitant du droit à l’asile, et procède depuis à l’accueil des personnes qui arrivent sur son territoire.</p>
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<p>Nombreuses sont les personnes qui osent tout de même la traversée, par voie terrestre ou maritime, vers l’Europe. La frontière gréco-turque est depuis devenue un lieu sinistre où les exilé.es sont soumis.es aux règles d’un ping-pong meurtrier et confronté.es, d’année en année, à toujours plus de monstruosités : «encampements», travaux forcés, mois d’attente puis de renvois, tentatives de traversée ratées, violences physiques et psychologiques, manque de sommeil, de nourriture et de soins.</p>
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<p>Au paroxysme de cette politique migratoire violente et violatrice des droits les plus fondamentaux se trouve le recours quasi systématique aux refoulements, ou « pushbacks ». Pour répondre à nos questions sur cette pratique, nous avons contacté Marion, avocate au Legal Centre Lesvos (LCL) en Grèce.</p>
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<p><img alt="fill1" src="../images/fill%201.jpg"></p>
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<p>**Ravages: ** Depuis quand les pushbacks existent-ils en Grèce ?</p>
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<p><img alt="Une silhouette d'algues à côté de la lune" src="../images/01/fill%201.jpg"></p>
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<p><strong>Ravages:</strong> Depuis quand les pushbacks existent-ils en Grèce ?</p>
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<p><strong>Marion :</strong> C’est une pratique bien connue depuis le début des années 2000 à la frontière terrestre dans le nord de la Grèce. Pour les renvois en pleine mer, avant 2020 c’était plus rare, on avait seulement connaissance de quelques épisodes isolés. Une fois la pandémie [de COVID] déclarée, les autorités grecques en ont profité pour instaurer cette nouvelle pratique de refoulements illégaux et clandestins. Avec des durcissements législatifs successifs du droit d’asile survenus en parallèle, c’est clairement devenu la norme.
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En Grèce, la frontière terrestre d’Evros étant une zone militarisée fermée au public, les ONG n’ont pas d’accès officiel, et c’est difficile de savoir ce qui s’y passe. Le même problème se pose pour les refoulements en mer Egée, ou les opérations de recherche et sauvetage sont interdites aux ONGs. On a donc mis un peu de temps avant de comprendre le phénomène des refoulements qui est devenu systématique et généralisé.</p>
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<p>**R: ** Comment ça se passe ?</p>
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<p>**M : ** La majeure partie des personnes qui traversent la mer Egée pour demander l’asile sont refoulées généralement au moins une fois, et le plus souvent, elles subissent des violences physiques ou verbales. Le modus operandi se répète : les personnes arrivent sur une des îles grecques, souvent dans une forêt ou sur une plage, et souhaitent se présenter aux autorités pour demander l’asile.
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<p><strong>R:</strong> Comment ça se passe ?</p>
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<p><strong>M :</strong> La majeure partie des personnes qui traversent la mer Egée pour demander l’asile sont refoulées généralement au moins une fois, et le plus souvent, elles subissent des violences physiques ou verbales. Le modus operandi se répète : les personnes arrivent sur une des îles grecques, souvent dans une forêt ou sur une plage, et souhaitent se présenter aux autorités pour demander l’asile.
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Une fois localisées par les autorités, elles sont forcées par des hommes armés et cagoulés à entrer dans des vans ou d’autres véhicules, souvent banalisés et sans immatriculation. Les personnes sont ensuite obligées à monter sur les bateaux des garde-côtes et sont emmenées à la « frontière » avec les eaux turques. Elles sont abandonnées en mer sur des canots de sauvetage sans moteur, sans moyen d’appeler au secours, mais aussi sans eau, sans nourriture, ni gilet de sauvetage, jusqu’à ce que les garde-côtes turcs les récupèrent. La dernière enquête du New York Times sur le sujet du mois de mai 2023 est un exemple poignant de cette pratique sur l’ile de Lesvos.</p>
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<p>A Evros, au nord de la Grèce, à la frontière terrestre, les personnes en exil sont souvent détenues dans des endroits non officiels et même parfois dans des commissariats de police frontaliers. Dans tous les cas, le vol de leurs papiers et de leur argent est systématique, une recette lucrative estimée à 2 millions d’euros selon une enquête des journaux Solomon et El Pais. Les téléphones aussi sont volés. C’est pourquoi documenter ces pratiques est très compliqué. Tout étant fait pour ne pas laisser aux personnes subissant ces mesures la possibilité de garder les preuves du traitement subi. La méthode est clandestine, maîtrisée et couteuse.</p>
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<p>Les personnes refoulées de la sorte vers la Turquie se retrouvent sans papiers, sans téléphone pour prévenir leurs proches, sans argent, et risquent un passage en détention. Ce sont des mois et des mois de perdus pendant lesquels il faut travailler, se cacher et espérer collecter assez d’argent pour repartir.</p>
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<p>**R: ** Qui pratique les pushbacks?</p>
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<p>**M : ** Il est compliqué d’avoir une réponse précise, car les hommes sont en principe cagoulés et habillés de noir, sans matricule ni signe distinctif. Ils opèrent toutefois depuis, ou avec des bateaux des garde-côtes grecs. Ce sont vraisemblablement des agents au service des garde-côtes, ou des gardes eux-mêmes. Ils sont méthodiques et armés. Pour gérer de nombreuses personnes en mer, il faut être bien entraîné. A la frontière terrestre, certains témoignages relatent la présence de la police grecque. Dans ces zones frontalières, plusieurs jeunes grecs, en devenant gardes frontières, voient un moyen de bien gagner leur vie et de trouver un emploi stable. Comble du cynisme, à Evros, les autorités grecques exploitent des personnes migrantes pour organiser les pushbacks et repousser les exilés sur la rivière Evros du côté turc.</p>
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<p>**R: ** Et avec quel argent ?</p>
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<p>**M : ** On a déjà entendu la commissaire à l’Union européenne Yvla Johansson dire que la Grèce doit être « le bouclier de l’Union ». Elle réagit toujours après les publications d’articles accablants sur le sujet des pushbacks en Grèce, mais au final rien ne bouge et rien ne change. Donc pour le Legal Centre Lesvos, c’est évident que l’Union européenne valide ces pratiques, autant par le manque de positionnement clair que par le financement direct attribué aux opérations aux frontières. Chaque année, des millions d’euros sont alloués pour les interventions aux frontières en bateaux, drones, radars, caméras infrarouge, caméras thermiques et autres technologies toujours plus sophistiquées… Et tout cela sans compter l’argent dédié à l’agence Frontex5 ! C’est donc difficile de croire que l’UE n’est pas complice... L’argument de l’Etat souverain gardien de ses frontières a alors souvent bon dos pour dire que c’est aux Grecs de ré-agir, mais l’Union Européenne demeure en grade partie le trésorier de ces pratiques. Ces politiques sont donc indirectement payées par nous toustes...</p>
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<p><img alt="Monstres en mer" src="../images/monstre_plein.jpg"></p>
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<p>**R: ** Quelle est la stratégie du Legal Centre Lesvos, en sachant que votre terrain d’action est celui du plaidoyer et du combat juridique ?</p>
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<p>**M : ** Les actions intentées devant les tribunaux nationaux grecs étant systématiquement classées sans suite, sans que des enquêtes indépendantes et sérieuses ne soient menées, nous avons été for-cé.es de saisir la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) pour tenter d’obtenir une prise de position officielle d’une institution, et surtout une réparation pour les victimes. 32 demandes, incluant deux cas représentés par le Legal Centre Lesvos, ont été communiquées à la Grèce en décembre 2021, et sont actuellement en attente d’une décision. D’autres plaintes ont été déposées mais n’ont pour l’instant toujours pas été étudiées, malgré les preuves déposées, sans que nous sachions pourquoi. L’argumentaire juridique dans ces cas est majoritairement basé sur l’article 2 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme – mise en danger de la vie d’autrui – , l’article 3 – traitements inhumains, dégradants et tortures –, et l’article 5 – détention arbitraire. La Grèce est le seule pays de l’Union européenne qui n’a jamais ratifié le protocole 4 de la Convention consacrant le principe d’interdiction des refoulements et l’interdiction des expulsions collectives – ce qui, de fait, exclu une condamnation sur ce seul fondement.</p>
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<p><strong>R:</strong> Qui pratique les pushbacks?</p>
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<p><strong>M :</strong> Il est compliqué d’avoir une réponse précise, car les hommes sont en principe cagoulés et habillés de noir, sans matricule ni signe distinctif. Ils opèrent toutefois depuis, ou avec des bateaux des garde-côtes grecs. Ce sont vraisemblablement des agents au service des garde-côtes, ou des gardes eux-mêmes. Ils sont méthodiques et armés. Pour gérer de nombreuses personnes en mer, il faut être bien entraîné. A la frontière terrestre, certains témoignages relatent la présence de la police grecque. Dans ces zones frontalières, plusieurs jeunes grecs, en devenant gardes frontières, voient un moyen de bien gagner leur vie et de trouver un emploi stable. Comble du cynisme, à Evros, les autorités grecques exploitent des personnes migrantes pour organiser les pushbacks et repousser les exilés sur la rivière Evros du côté turc.</p>
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<p><strong>R:</strong> Et avec quel argent ?</p>
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<p><strong>M :</strong> On a déjà entendu la commissaire à l’Union européenne Yvla Johansson dire que la Grèce doit être « le bouclier de l’Union ». Elle réagit toujours après les publications d’articles accablants sur le sujet des pushbacks en Grèce, mais au final rien ne bouge et rien ne change. Donc pour le Legal Centre Lesvos, c’est évident que l’Union européenne valide ces pratiques, autant par le manque de positionnement clair que par le financement direct attribué aux opérations aux frontières. Chaque année, des millions d’euros sont alloués pour les interventions aux frontières en bateaux, drones, radars, caméras infrarouge, caméras thermiques et autres technologies toujours plus sophistiquées… Et tout cela sans compter l’argent dédié à l’agence Frontex5 ! C’est donc difficile de croire que l’UE n’est pas complice... L’argument de l’Etat souverain gardien de ses frontières a alors souvent bon dos pour dire que c’est aux Grecs de ré-agir, mais l’Union Européenne demeure en grade partie le trésorier de ces pratiques. Ces politiques sont donc indirectement payées par nous toustes...</p>
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<p><img alt="Monstres volant au-dessus de la mer" src="../images/01/monstre_plein.jpg"></p>
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<p><strong>R:</strong> Quelle est la stratégie du Legal Centre Lesvos, en sachant que votre terrain d’action est celui du plaidoyer et du combat juridique ?</p>
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<p><strong>M :</strong> Les actions intentées devant les tribunaux nationaux grecs étant systématiquement classées sans suite, sans que des enquêtes indépendantes et sérieuses ne soient menées, nous avons été for-cé.es de saisir la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) pour tenter d’obtenir une prise de position officielle d’une institution, et surtout une réparation pour les victimes. 32 demandes, incluant deux cas représentés par le Legal Centre Lesvos, ont été communiquées à la Grèce en décembre 2021, et sont actuellement en attente d’une décision. D’autres plaintes ont été déposées mais n’ont pour l’instant toujours pas été étudiées, malgré les preuves déposées, sans que nous sachions pourquoi. L’argumentaire juridique dans ces cas est majoritairement basé sur l’article 2 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme – mise en danger de la vie d’autrui – , l’article 3 – traitements inhumains, dégradants et tortures –, et l’article 5 – détention arbitraire. La Grèce est le seule pays de l’Union européenne qui n’a jamais ratifié le protocole 4 de la Convention consacrant le principe d’interdiction des refoulements et l’interdiction des expulsions collectives – ce qui, de fait, exclu une condamnation sur ce seul fondement.</p>
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<p>Nous espérons une « décision position » de la CEDH, mais ne sommes tout de même pas certains que cela mènera à une amélioration de la situation aux frontières. Dans d’autres affaires, nous avons déjà vu la Cour justifier les pratiques de refoulement en invoquant le fait que les personnes en migration doivent utiliser les « points d’entrée officiels » pour demander l’asile. Cet argument est toutefois inopérant : le deal signé entre l’UE et la Turquie est justement fait pour que les Turcs retiennent les personnes exilées sur leur territoire et les empêchent de venir en Europe. Ces points d’entrée, c’est pour les touristes et les achats de cigarettes moins chères, aucune chance d’y demander l’asile. La plupart des plaignant.es que nous représentons ont depuis réussi à migrer dans d’autres pays de l’UE et ont été reconnu.es réfugié.es là-bas. Il est primordial de continuer de dénoncer ces méthodes illégales aux frontières malgré la pression accrue sur les ONGs et le monde militant. La Turquie et la Grèce instrumentalisent au maximum le sujet chacune de leur côté. En Turquie, certaines institutions publient et dénoncent le traitement grec des personnes en migration. Elles tentent de calculer le nombre de pushbacks et déplorent publiquement que la Grèce financée par l’UE gère si mal ses frontières. La Grèce quant à elle, dans son discours affirme qu’il s’agit de la propagande d’Erdogan. La vieille rengaine entre les deux pays… et pendant ce temps rien ne change! Il faudra certainement encore des années d’investigations et de dénonciation pour arriver à faire bouger la pratique, si une autre, encore plus dramatique, n’est pas inventée d’ici là. La prochaine piste à explorer est de tenter de faire qualifier les pushbacks en tant que crimes contre l’humanité, et de se battre sur le terrain pénal.</p>
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<p><img alt="Fill plantes" src="../images/fill%202.jpg"></p>
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<p><img alt="Plantes aux allures d'algues" src="../images/01/fill%202.jpg"></p>
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<p>En fouillant dans la littérature pharmaceutique, on découvre que « les médicaments de la famille des gabapentinoïdes, dont le Lyrica fait partie, semblent être une cause de mortalité insuffisamment recherchée en médecine légale, notamment dans le cadre des décès pour overdose d’opioïdes », ce qui veut dire, dans notre langue, que le Lyrica tue un grand nombre d’usager.es d’opioïdes, mais que, pour le moment, personne n’a vraiment envie de savoir combien, ni bien sûr de bouger un doigt pour les aider.</p>
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<p>Merci Pfizer, encore une fois.</p>
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<p>Mais laissons la parole à notre ami K., [ancien usager de Lyrica] qui vit à Briançon depuis plus de deux ans.</p>
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<p>**R : ** Toi, t’as quoi à me dire sur le Lyrica ?</p>
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<p>**K : ** Encore hier, il y a un gars du Refuge Solidaire<sup id="fnref:2"><a class="footnote-ref" href="#fn:2">2</a></sup> qui savait qu’il était en manque, alors il a pris son drap et il est allé dormir dans le parking près du refuge.</p>
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<p>**R : ** Mais il a dormi sur le parking, à même le sol ?</p>
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<p>**K : ** Bah oui, il savait qu’avec tout le monde au Refuge il pourrait pas se contrôler, alors il est parti sur le parking, tranquille, tout seul.</p>
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<p>**R : ** La dernière fois quand je t’ai demandé c’était quoi les plats typiques de l’Algérie, tu m’as répondu que c’était le Lyrica ! Parce qu’au Maroc y’a pas une aussi grande consommation, c’est ça ?</p>
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<p>**K : ** Pour la moitié des gens, comme les Marocains, la prise de Lyrica commence en Turquie. A Takzim, les potes que tu vas te faire ils vont te proposer du Lyrica. Les gens ils en vendent dans les camps, dans les associations. Au Maroc on a d’autres drogues, des Karkoubi [drogues psychotropes] comme roche [surnom du Valium]. Mais on n’a pas trop de Lyrica. Et tu vois, les gens qui sont pas sociables, qui sont timides et tout, ils prennent du Lyrica. Les gens qui sont SDF en Bosnie et qui partent dans les markets ou au feu rouge pour demander de l’argent, eux ils prennent du Lyrica, ça les encourage à faire ça. Pour voler aussi, ça donne du courage.
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<p><strong>R :</strong> Toi, t’as quoi à me dire sur le Lyrica ?</p>
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<p><strong>K :</strong> Encore hier, il y a un gars du Refuge Solidaire<sup id="fnref:2"><a class="footnote-ref" href="#fn:2">2</a></sup> qui savait qu’il était en manque, alors il a pris son drap et il est allé dormir dans le parking près du refuge.</p>
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<p><strong>R :</strong> Mais il a dormi sur le parking, à même le sol ?</p>
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<p><strong>K :</strong> Bah oui, il savait qu’avec tout le monde au Refuge il pourrait pas se contrôler, alors il est parti sur le parking, tranquille, tout seul.</p>
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<p><strong>R :</strong> La dernière fois quand je t’ai demandé c’était quoi les plats typiques de l’Algérie, tu m’as répondu que c’était le Lyrica ! Parce qu’au Maroc y’a pas une aussi grande consommation, c’est ça ?</p>
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<p><strong>K :</strong> Pour la moitié des gens, comme les Marocains, la prise de Lyrica commence en Turquie. A Takzim, les potes que tu vas te faire ils vont te proposer du Lyrica. Les gens ils en vendent dans les camps, dans les associations. Au Maroc on a d’autres drogues, des Karkoubi [drogues psychotropes] comme roche [surnom du Valium]. Mais on n’a pas trop de Lyrica. Et tu vois, les gens qui sont pas sociables, qui sont timides et tout, ils prennent du Lyrica. Les gens qui sont SDF en Bosnie et qui partent dans les markets ou au feu rouge pour demander de l’argent, eux ils prennent du Lyrica, ça les encourage à faire ça. Pour voler aussi, ça donne du courage.
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Beaucoup de gens ils en prennent pour marcher aussi, pour traverser la montagne, pour se donner de l’énergie.</p>
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<p>**R : ** Et t’en a déjà pris ? Tu ressens quoi exactement ? T’es pas obligé de répondre si tu veux pas.</p>
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<p>**K : ** Moi mon maximum c’est 21 en une journée ! Une fois au Refuge, parce que t’as le droit à 3 pilules maximum par jour<sup id="fnref:3"><a class="footnote-ref" href="#fn:3">3</a></sup>, y’a un gars il disait « mais moi je suis habitué à 7 ou 8 par jour » et moi je lui ai pas dit mais j’en prenais parfois 17, 21 par jour (rires). Mais il faut se contrôler, j’ai pas tout pris d’un coup, comme ça tu sais. Il faut en prendre sur la journée. Au début t’en prends, t’as plein d’énergie et tout. Ça te rend trop sociable, ça te donne du courage et un peu de force. Et quand tu commences à sentir que l’énergie ça finit, tu prends encore. Mais à la fin moi quand j’ai senti que c’est bon l’énergie c’est fini, j’ai arrêté d’en prendre, j’ai aussi senti que je pouvais m’endormir n’importe où. J’avais les yeux tout rouges, et plus d’énergie. Et si tu continues de trainer, par exemple de marcher, tu commences à oublier où tu es et tu peux t’endormir d’un coup. Et tu peux plus marcher normalement. Et puis, y’a des gens le lendemain ils se souviennent plus de rien. Ca te fait vraiment sentir high, mumteshi [défoncé en darija marocain]. Le best combo, c’est Lyrica, du coca, et fumer du shit. Ça c’est comme si ça explosait la force du Lyrica, ça donne vraiment un trop trop grand high.</p>
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<p>**R : ** Mais du coup quand t’es habitué à en prendre 21 par jours et qu’après tu peux en prendre seulement trois, le manque il se manifeste comment ?</p>
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<p>**K : ** Quand t’es en manque y’a des gens ils deviennent vraiment trop agressifs. Y’a des gens qui volent et qui tuent à cause du Lyrica sur la route. Une fois j’étais en prison en Slovénie et y’avait des gens qui étaient en manque de Lyrica. Et les employés de la prison ne voulaient pas leur en donner. Alors les exilé.es ont commencé à ouvrir leur corps, à se faire du mal à eux-même<sup id="fnref:4"><a class="footnote-ref" href="#fn:4">4</a></sup> et à tout casser. Les toilettes, les chaises… Et une fois qu’ils ont ouvert leur corps, on leur a donné du Rivotril.<sup id="fnref:5"><a class="footnote-ref" href="#fn:5">5</a></sup>
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<p><strong>R :</strong> Et t’en a déjà pris ? Tu ressens quoi exactement ? T’es pas obligé de répondre si tu veux pas.</p>
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<p><strong>K :</strong> Moi mon maximum c’est 21 en une journée ! Une fois au Refuge, parce que t’as le droit à 3 pilules maximum par jour<sup id="fnref:3"><a class="footnote-ref" href="#fn:3">3</a></sup>, y’a un gars il disait « mais moi je suis habitué à 7 ou 8 par jour » et moi je lui ai pas dit mais j’en prenais parfois 17, 21 par jour (rires). Mais il faut se contrôler, j’ai pas tout pris d’un coup, comme ça tu sais. Il faut en prendre sur la journée. Au début t’en prends, t’as plein d’énergie et tout. Ça te rend trop sociable, ça te donne du courage et un peu de force. Et quand tu commences à sentir que l’énergie ça finit, tu prends encore. Mais à la fin moi quand j’ai senti que c’est bon l’énergie c’est fini, j’ai arrêté d’en prendre, j’ai aussi senti que je pouvais m’endormir n’importe où. J’avais les yeux tout rouges, et plus d’énergie. Et si tu continues de trainer, par exemple de marcher, tu commences à oublier où tu es et tu peux t’endormir d’un coup. Et tu peux plus marcher normalement. Et puis, y’a des gens le lendemain ils se souviennent plus de rien. Ca te fait vraiment sentir high, mumteshi [défoncé en darija marocain]. Le best combo, c’est Lyrica, du coca, et fumer du shit. Ça c’est comme si ça explosait la force du Lyrica, ça donne vraiment un trop trop grand high.</p>
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<p><strong>R :</strong> Mais du coup quand t’es habitué à en prendre 21 par jours et qu’après tu peux en prendre seulement trois, le manque il se manifeste comment ?</p>
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<p><strong>K :</strong> Quand t’es en manque y’a des gens ils deviennent vraiment trop agressifs. Y’a des gens qui volent et qui tuent à cause du Lyrica sur la route. Une fois j’étais en prison en Slovénie et y’avait des gens qui étaient en manque de Lyrica. Et les employés de la prison ne voulaient pas leur en donner. Alors les exilé.es ont commencé à ouvrir leur corps, à se faire du mal à eux-même<sup id="fnref:4"><a class="footnote-ref" href="#fn:4">4</a></sup> et à tout casser. Les toilettes, les chaises… Et une fois qu’ils ont ouvert leur corps, on leur a donné du Rivotril.<sup id="fnref:5"><a class="footnote-ref" href="#fn:5">5</a></sup>
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Tu peux mourir à cause du Lyrica. Une fois, j’étais en Bosnie, il y a des gens ils vivaient dans une maison abandonnée. C’était des migrants. Ils ont passé la limite du Lyrica.</p>
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<p>**R : ** T’entends quoi par la limite du Lyrica ?</p>
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<p>**K : ** Ils ont pris plus qu’un paquet. Et dans un paquet des fois il y a 14, des fois il y a 21 pilules. Ils étaient trois personnes. Un il était sorti de la maison. Un il était déjà en train de dormir, en overdose, K.O. Et l’autre il était au téléphone avec sa mère. Et dans la maison il y avait pas de lumière. Il a allumé une bougie mais il était sous Lyrica alors il a rien mis en bas de la bougie, il l’a posée directement sur la couverture. Et le mec il avait seulement envie de parler avec sa mère et après c’est bon, il dort. Le moment où il a fini l’appel avec sa mère, il a commencé à être en overdose lui aussi, et il a oublié d’éteindre la bougie. La bougie elle a continué, continué de fumer et ça a allumé la couverture. Et parce que vraiment ils avaient trop pris de Lyrica, ils se sont pas réveillés. C’est la troisième personne qui était pas dans la maison qui est rentrée et a trouvé que tout avait brûlé. Ils sont restés les deux dans le coma et au bout d’un mois l’un est mort et l’autre s’est réveillé...
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<p><strong>R :</strong> T’entends quoi par la limite du Lyrica ?</p>
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<p><strong>K :</strong> Ils ont pris plus qu’un paquet. Et dans un paquet des fois il y a 14, des fois il y a 21 pilules. Ils étaient trois personnes. Un il était sorti de la maison. Un il était déjà en train de dormir, en overdose, K.O. Et l’autre il était au téléphone avec sa mère. Et dans la maison il y avait pas de lumière. Il a allumé une bougie mais il était sous Lyrica alors il a rien mis en bas de la bougie, il l’a posée directement sur la couverture. Et le mec il avait seulement envie de parler avec sa mère et après c’est bon, il dort. Le moment où il a fini l’appel avec sa mère, il a commencé à être en overdose lui aussi, et il a oublié d’éteindre la bougie. La bougie elle a continué, continué de fumer et ça a allumé la couverture. Et parce que vraiment ils avaient trop pris de Lyrica, ils se sont pas réveillés. C’est la troisième personne qui était pas dans la maison qui est rentrée et a trouvé que tout avait brûlé. Ils sont restés les deux dans le coma et au bout d’un mois l’un est mort et l’autre s’est réveillé...
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Mais il faut pouvoir contrôler. Parce que un peu ça t’aide trop. Tu en prends pour passer, sur la route. Quand tu marches dans la forêt ou quand tu sais que tu vas devoir faire des trucs durs. Mais trop vraiment c’est dangereux. Tu peux devenir tellement agressif, faire vraiment n’importe quoi, et après tu te rappelles de rien.</p>
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